dimanche 26 février 2012

La Birmanie entre beauté et oppression











Depuis notre hublot, on aperçoit la ville de Yangon de nuit peu éclairée, comparée aux milles lumières de Bangkok. Après deux heures de retard, on touche le sol birman et très vite on découvre les femmes maquillées au tanaka et les hommes habillés avec leurs longyis. Dans les rues sombres, on cherche une guesthouse en faisant attention où l’on met les pieds étant donné qu’il y a des trous partout sur le trottoir. Les odeurs tantôt de cuisine, tantôt de détritus rappelle fortement à la Sand l’ambiance de l’Inde et elle se demande où elle a atterrit.
  
Les moments forts sont :
     
- L’escalator et les jeunes moines. Pour visiter Shwedagon Paya à Yangon, on emprunte des escalators et surprise en arrivant en haut. Une quinzaine de jeunes femmes moines sont tétanisées à l’idée de prendre les escalators pour descendre. Certaines ont l’air paniquées, d’autres intriguées devant cet engin moderne. Là, on réalise qu’on est dans un pays à part. Image d’un autre temps d’observer une jeune moine hésitante et apeurée devant ce tapis roulant, écoutant les conseils d’une dame. Puis soudainement, elle bondit sur ce dernier tout en s’agrippant à la dame venue en aide. Premier aperçu d’un pays où la population découvre la modernité. 

- Tentative de sortir des sentiers battus. Après la visite du monastère du Mont Popa, on retourne au village à pied. Le long du chemin, beaucoup de personnes entassées dans les pick-up ou les bus nous lancent un « hello » ou nous saluent en levant la main. Les rôles sont inversés, les touristes à pied et les birmans en pick-up. Cela surprend et provoque bien des sourires. On arrive au village et on se renseigne pour trouver un lieu où dormir. Il n’y a que deux hôtels, un à 70 dollars la chambre et l’autre à 40 dollars. C’est trop pour notre budget et il nous est impossible de dormir à moins cher. Depuis peu, le gouvernement exige des guesthouses une licence très excessive pour avoir le droit de faire dormir des touristes. Ce dernier nous interdit de dormir chez l’habitant, sous tente, ou tout dernièrement au monastère. Ces exigences sont soit disant pour la sécurité des touristes mais personnellement, on pense que c’est une manière détourner de faire plus d’argent et d’éviter aux touristes d’avoir un contact direct avec les birmans. On quitte alors le village à l’arrière d’un camion et on arrive dans une ville où il est interdit aux étrangers de séjourner. Aucun hôtel ne peut nous accueillir. On marche en direction de la station de bus et en chemin, pour la première fois de notre voyage, on se sent réellement comme des gens venus d’un autre monde. Tous les regards sont braqués sur nous qui se détendent dès l’instant où l’on sort le mot mingalaba (bonjour). La Sand se fait même offrir un paquet de chips, fait maison, juste avant d’entrer dans le bus. Depuis cet instant, on décide de suivre le trajet traditionnel, en essayant d’éviter la masse touristique.  

- Un dollar neuf contre une poignée de kyats défoncés. On fait la connaissance d’Audrey et Jonathan, un couple de français partis pour trois ans à la découverte du monde. Comme on s’entend bien, on passe la journée en pick-up à découvrir les alentours de la ville (Sagaing, Inwa et Amapurana). Nos principales discussions sont l’augmentation des prix des guesthouses. Elles ne correspondent pas du tout à ce qui est inscrit dans les guides et la qualité est bien au-dessous du prix. Comme nous, ils ont fait un budget pour un mois en prenant des dollars car il n’y a pas de bancomat pour retirer de l’argent et il est impossible d’utiliser la carte bancaire. Tout se paye en USD sauf la nourriture et les trajets en bus. De l’extérieur et sur internet, il est impossible de connaître le taux réel du kyat. On a changé notre argent au marché local de Yangon où le taux reste plus ou moins stable mais varie chaque jour. Par contre dès qu’on sort de la ville, le taux chute. On se retrouve donc régulièrement à compter notre argent pour vérifier si on en a pris assez. On a failli oublier ! Les dollars doivent être neufs, ni pliés et ni tâchés. Ce qui veut dire que la seule erreur peut nous obliger à sortir plutôt que prévu du pays, faute de billets non acceptés. On rencontrera bien d’autres touristes avec la peur de ne pas avoir suffisamment d’argent pour terminer leur séjour. 

- Rencontre avec Cherry. A la sortie d’une pagode, une vieille dame birmane nous accoste en bon anglais. Après une courte discussion, elle nous invite à boire un thé. On se retrouve à papoter avec cette ancienne professeure de langue qui corrige le Guims lorsque ce dernier fait quelques erreurs en anglais. Elle nous accompagne vers une autre pagode. En chemin et loin des regards, on lui demande comment est sa vie ? Elle nous répond que ça dépend des jours mais que c’est difficile car elle ne peut faire confiance en personne, même au moine car certains sont corrompus. Selon elle, les murs ont des oreilles et elle est convaincue que certaines personnes la surveillent. Elle vit seule et son gagne-pain est la bonne volonté des touristes qu’elle guide volontiers dans la ville. Elle ne peut parler ouvertement du gouvernement sous peine de se faire réprimander. Un beau partage, une réalité difficile, bien réelle mais peu visible.   

- Un bout d’authenticité. On arrive de nuit à Taunggy où on trouve un hôtel vers 6 heures du matin, après 3 heures d’attente dans les rues. Après une longue sieste, on décide d’aller visiter cette ville qui est peu touristique. En chemin, le Guims s’arrête pour regarder un horloger de rue travailler. Il essaye en vain de lui expliquer qu’il fait le même métier. Pendant ce temps, la Sand se fait accoster par une birmane qui lui propose de lui faire goûter des avocats. On se retrouve alors entourés de 7-8 personnes qui observent le moindre de nos gestes. On essaye de communiquer en dégustant l’avocat au sucre mais c’est difficile dû à la langue. On passe un agréable moment à échanger des regards et des sourires.   

- Un rituel particulier. On s’en va découvrir la grotte aux huit milles bouddhas à Pindaya. Le lieu est mystique et l’atmosphère qui y règne est plutôt agréable. A la sortie, on entend des chants très rythmés et on va y jeter un coup d’œil. On se retrouve assis par terre, avec des friandises devant nous et avec chacun une tasse de thé. Apparemment, c’est un jour de fête. Plusieurs birmans nous prennent en photo. Ils sont très curieux de notre présence et nous font de beaux sourires. Huit enfants habillés tout en blanc, maquillés attendent patiemment sur des canapés. On suppose que c’est similaire à une première communion. Un premier enfant est porté à l’extérieure de la salle et lorsqu’il revient il est mouillé de la tête au pied. Ensuite, un moine s’approche et commence à lui raser la tête. A cet instant, on comprend que la cérémonie qui est en train de se dérouler sous nos yeux est un rituel pour devenir moine.      

- Contacts avec les birmans. Les birmans sont très curieux. Dès qu’ils peuvent placer un mot d’anglais, ils n’hésiteront pas à l’utiliser ou ils trouveront un autre moyen afin d’entrer en communication avec nous. On garde en tête pleins de petits instants de partage. Par exemple, pour trouver l’emplacement d’un bus, on s’est fait escorter par quatre birmans sans avoir rien demandé. La Sand qui attend son tour pour aller aux toilettes se fait prendre la main par une dame qui l’emmène à la seule toilette non turque en passant devant tout le monde. Le Guims se fait accoster par un moine qui aime discuter avec les touristes. Il lui explique que communiquer avec des étrangers lui permet de voyager. Un birman conduit la Sand jusqu’aux toilettes alors que ce dernier est en train de manger. Durant un déplacement, le Guims à accrocher nos chaussures sur son sac à dos. Comme la montée est difficile quelques birmans s’accrochent aux chaussures et se laissent tirer. Bien des sourires à la clé. Pendant un trajet en pick-up, la Sand déguste des petits snacks locaux qu’une birmane à plaisir à lui faire découvrir. A la plage, trois jeunes étudiants birmans nous prennent en photo et après une courte discussion la Sand reçoit un porte-monnaie en bambou offert par l’un des trois. On pourrait encore en citer beaucoup. Au final, ces échanges et ces attentions nous montrent que c’est un peuple très accueillant. 
     
- La beauté du lac Inlé. On passe la journée en compagnie de Benoît et Marie (un couple de français, parti pour un voyage de 8 mois) et de Jonathan et Audrey. En barque, on se promène sur le lac à découvrir leur manière de pêcher ou de ramer, les jardins flottants ainsi que les villages sur pilotis. Ce lieu est splendide et paisible mais malgré cela à la fin de la journée on est partagé. Il y a eu des personnes très intéressées à nous voir alors que d’autres, des enfants, nous ont jeté des cailloux. Durant cette journée, on a pu observer leur vie de tous les jours en toute liberté mais a-t-on respecté leur intimité ?  

- Un cuisinier hors pair. Toujours accompagnés de nos deux compères, Audrey et Jonathan, on part marcher durant trois jours dans la région de Kalaw. Pour ce trek, on est obligé d’avoir un guide qui est accompagné d’un cuisinier. Ce dernier nous prépare de succulents mets birmans. Treking facile qui nous permet d’observer la vie de la campagne et une partie du territoire des femmes dragons. Les chars à bœuf, les maisons en bambou et le travail physique quotidien nous conduisent dans une autre époque où tout est paisible et où la nature dicte le temps. 

Pour conclure, la Birmanie est un grand pays avec des régions très différentes. Certaines sont interdites aux touristes à cause du trafic de drogue, d’humains et du travail forcé. Certaines ethnies s’entretuent pour avoir plus de territoire et d’autres ne se considèrent pas comme des birmans. Le gouvernement par le biais des militaires exerce une forte pression sur le peuple. Très rapidement, on découvre que notre argent aide à maintenir ce pouvoir en place. C’est pour cela, qu’on a mangé le plus souvent dans les rues et dormi dans des guesthouses les moins chères. On a évité de prendre le train ou l’avion car cela appartient au gouvernement. Ce qui nous a le plus choqué, ce sont les birmans (femmes-hommes-enfants) qui construisent les routes à coups de pioche, en cassant les pierres au bord de la route, en portant ces dernières sur la tête, tout en déversant le goudron fumant tel un jardinier arrosant son gazon. Tous ces efforts pour gagner après une journée de travail 1.5 dollars. C’est la première fois dans un pays où notre liberté de voyageur a été restreinte et on s’est senti privé de certains droits. Tant que les droits de l’homme ne seront pas respectés nous n’y repasseront pas. Un petit clin d’œil, à nos deux crapules et à Léa et François avec qui on a passé d’agréables moments de rigolage, de partage, de longues discussions et de parties de cartes.  

2 commentaires:

AFRIQUELATINE a dit…

Merci pour ce beau récit et ces belles images, on s'y croirait.
Et communiquer avec un avocat dans la bouche, avec la place que tient la langue...
enfin, si on a bien compris...
Bisous à tous les deux!
Quand est-ce qu'on pourra voir vos frimousses?

Luc et Ingrid

Barbarossa a dit…

coucou les petits loups !

ça fait plaisir d'avoir de si beau récit. On ressent que vous avez eu beaucoup de plaisir en vous lisant. Il semble que vous avez moins été frustré par les "attrapes" touristes et les profiteurs, c'est cool.

Vos photos sont toujours autant incroyables, vous avez l'oeil, c'est sûr !

A bientôt